Le Québec moderne n’a jamais réellement habité la ville ; ou alors il n’a jamais habité la ville réelle. Peu importe, car cela ne l’a pas empêché d’en parler plus que de tout autre espace. Dans ce livre, je veux mesurer les conséquences de cette contradiction. Je veux chercher à lire la ville contemporaine au Québec, celle dont hérite le jeune xxi e siècle… Mais si on souhaite poursuivre ici, il faudra accepter d’abandonner le mot “ville” en chemin. C’est l’urbanisation et la littérature qu’il faudra aborder comme deux choses interdépendantes depuis les années 1960 au Québec. L’urbanisation et la ville ne sont pas la même chose du tout. La première est un processus, la seconde est son résultat. L’urbanisation est vivante et mobile alors que la ville est morte, ou en tout cas figée, abstraite. Bref, l’une existe, et l’autre pas. Il y a là un problème considérable. Dans ce livre, je parle d’étalement, de zonage, de friches, de banlieues, de chantiers et d’infrastructures — de ces espaces périurbains, depuis longtemps majoritaires dans le paysage nord-américain. J’en parle comme des lieux où la vie devrait pouvoir accéder à l’art. Et plus spécifiquement à l’art littéraire.